ABBE HANQUET
Bonne Chasse (1)
Que d'autos ! Pas moyen de « stopper » devant le n° 4. On
s'arrête plus loin.
Le corridor. Une multitude de gosses jouent à cache-cache
derrière les tas de manteaux.
Un salon, deux salons. Du monde ! Des parents, des enfants,
des jeunes ménages, des vieux ménages ― mais
jeunes quand même ― des jeunes gens, des jeunes
filles.
Que se passe-t-il ? Eh bien voilà. L'abbé Hanquet ― Manu pour la famille ―
s'en va ! Manu, vous savez bien. Le toujours dévoué dans les œuvres, l'animateur
de quelques troupes scoutes ― il est dangereux
de les citer parce qu'on risque d'en oublier ―
Manu l'ami de tous, le joyeux compère, le ―
oserais-je le dire ― le chanteur comique du
Séminaire ! Bref, tel que chacun l'a connu, Manu Hanquet est le héros de cette
soirée. Il va prendre le train pour Rome, puis il s'en ira vers la Chine.
Il part travailler « aux sillons les plus lointains », là où
manquent les ouvriers. Ça, c'est épatant ! Aussi chacun est heureux. Les
conversations sont animées. Manu passe de groupe en groupe, fait rire une fois
de plus, sème la joie.
Mais l'heure du train approche. Il faut se quitter. On est
heureux, évidemment, que Manu aille travailler là-bas, niais on aimerait autant
le garder ici. Allons, tant pis... on a la Foi ! Dieu demande de gros
sacrifices ? A Votre service, Seigneur ! Tant pis ou plutôt tant mieux !
Au revoir à chacun ! Cousin, cousine, oncle, tante, frère, sœur...
papa... maman... Manu bénit sa famille agenouillée.
A la gare, des vieux amis. « Ah oui, les routiers, on va
servir. » Ils chantent des chants de conquête.
Bénédiction. Poignée de mains.
Encore deux minutes. Allons, place à la joie ! Et Manu, de
la fenêtre, entonne « J'ai connu dans mon jeune âge... » Manu, va ! Toujours le
même !
Abbé Palmers.
(1)
L'expression : bonne chasse n'a
rien de cynégétique : M. l'abbé Hanquet n'est pas un missionnaire-chasseur.
L'expression « bonne chasse » selon le langage scout a perdu son sens, de jungle
et signifie de façon imagée: bon travail. (N. d. l. R.)